Réussir l'entrée de bébé en crèche

Il y a-t-il un « bon » âge pour mettre son enfant en crèche ?

Valérie Calvet ( éducatrice de jeunes enfants): La question ne se pose pas en ces termes. Les parents qui demandent une place en crèche travaillent tous les deux, l’entrée de leur enfant dépend donc de la date de reprise du travail de la mère et des résultats des commissions d’admissions des crèches, qui se tiennent plusieurs fois dans l’année.

En résumé, les parents ne « choisissent » pas vraiment le moment où ils confient leur enfant à la crèche. De toutes façons, il n’y a pas d’âge idéal : tout dépend de la relation mère/enfant. Si celle-ci est très fusionnelle, la séparation sera plus difficile, quel que soit l’âge du bébé.

On parle souvent d’un âge critique, vers 8-10 mois. Cette période n’est-elle pas à éviter pour l’arrivée du bébé en crèche ?

Vers 8-10 mois, l’enfant se rend compte qu’il ne fait pas qu’un avec sa mère. Il prend conscience que l’autre peut se séparer de lui et qu’il peut donc partir à tout moment d’où sa peur de l’abandon. Mais l’arrivée en crèche est préparée, grâce à la période d’adaptation (une à deux semaines) qui est justement prévue pour habituer l’enfant. On ne peut pas établir de règle s’appliquant à tous les bébés, et j’ai vu beaucoup d’enfants de 8-10 mois pour qui l’entrée en crèche s’est très bien passée.

Comment se préparer, en tant que mère, à l’entrée en crèche ?

Je conseillerai à la mère, dès qu’elle a obtenu une place en crèche, de contacter l’établissement pour poser les questions qui peuvent la tracasser, demander à consulter le règlement intérieur ou le projet pédagogique. Savoir concrètement comment fonctionne une crèche, visualiser les choses contribuera à la rassurer.

La situation est plus délicate si la mère reprend le travail à contrecoeur et qu’elle n’a absolument aucune envie de confier son enfant à la crèche ! Si elle s’en sent capable, elle a tout intérêt à le dire à l’équipe de la crèche, qui pourra alors l’accompagner et trouver des solutions pour calmer son angoisse (par exemple, l’autoriser à passer un coup de fil dans la journée pour s’assurer que tout va bien).

Faut-il préparer aussi son enfant ?

Bien sûr ! Il est indispensable que sa mère lui explique la situation : « Je dois rependre le travail et tu vas donc rester la journée à la crèche, où on s’occupera bien de toi. Et je reviendrai (ou Papa viendra) te chercher tous les soirs. Ne t’inquiète pas, je retourne travailler mais je t’aime toujours autant ! » Il faut parler à son enfant quel que soit son âge, même s’il semble trop petit pour comprendre.

Cela n’empêchera certes pas l’enfant de manifester sa tristesse, ou sa colère, parce qu’il est normal qu’il préfère rester avec sa maman que d’aller à la crèche ! Une séparation n’est jamais agréable, et celle-ci représente un vrai changement de vie pour lui, auquel il devra s’habituer. Mais ce processus est aussi utile pour lui, car il lui montre que ses parents peuvent le laisser, mais qu’ils reviennent toujours le chercher. L’enfant comprend que la séparation est temporaire, et qu’il n’est pas abandonné pour autant.

Et du côté de la crèche, comment se passe l’arrivée d’un nouvel enfant ?

L’arrivée de tout enfant commence par « l’adaptation », qui est une présence progressive au sein de l’établissement entre l’enfant, sa famille et le personnel. Le premier jour est une prise de contact, où la mère rencontre l’équipe et la personne référente chargée de l’accueil de son bébé, et à laquelle elle détaillera toutes les habitudes de vie de son enfant. Ensuite, il y a un temps de présence commune de la mère et de son enfant au sein de la section, puis un temps ou l’enfant vient seul pendant une heure, puis des temps de présence de plus en plus longs, incluant un repas, puis un temps de sommeil. A la fin de l’adaptation, l’enfant aura passé une journée complète à la crèche.

Je voudrai aussi préciser que le personnel de la crèche s’efforce de respecter, autant que possible, les habitudes de l’enfant à la maison : heures de sieste, rituels d’endormissement, repas, etc.

Quelles sont les erreurs à éviter ?

Il y a plusieurs erreurs que font certains parents sans s’en rendre compte. En voici quelques unes.

Ne rien dire à son enfant, et le « jeter » en crèche sans explication, sous prétexte qu’il est trop jeune pour comprendre. Je l’ai déjà dit, mais j’insiste car il est vraiment important de mettre des mots sur toute situation nouvelle pour lui (et cela ne concerne pas que l’entrée en crèche !).

Quitter la crèche en catimini, sans que l’enfant voie Papa ou Maman partir, pour éviter qu’il pleure. C’est dangereux car cela signifie pour lui que ses parents peuvent disparaître à tout moment, sans explication. Cela peut être source d’angoisse qui risque de le réveiller la nuit, pour être sûr que ses parents sont là. Il faut donc dire au revoir à son enfant, lui dire qu’on reviendra le chercher le soir… et accepter qu’il manifeste son mécontentement par des pleurs. La plupart du temps d’ailleurs, il se calme dès que sa mère ou son père a fermé la porte !

Faire de « faux départs » de la crèche, c’est-à-dire revenir dans la section après avoir dit « au-revoir » à l’enfant. L’enfant en déduira que son parent va revenir malgré ses adieux et peut rester derrière la porte à l’attendre !

Interdire la tétine et le doudou en dehors de la sieste, « parce que c’est comme ça à la maison ». Dans un premier temps, si ces objets l’aident à mieux vivre la séparation et le rassurent, tant mieux. Il sera toujours temps de les lui ôter par la suite.

Propos recueillis par Marie-Pierre Noguès-Ledru 

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